Cours de création littéraire

Borealium Tremens

Par |2016-12-21T15:11:49-05:0026 juin, 2013|Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, L'histoire commence. Atelier du roman, Roman, Textes de creation|

Je pose mon crayon sur la pile de papier, je rallume ma pipe pour m'aider à réfléchir. Par la fenêtre se dressent les montagnes du Nord, solides et fières. Je m'apprête à décrire mon frère dans ce journal, pour mon roman. De fait, ce ne sera plus mon frère, mais une création de mon esprit, une représentation, une fiction. Il pourrait devenir n'importe qui ou n'importe quoi. Ou simplement ne plus être l’ostie d'alcoolique déraciné qu'il est devenu, condamné à boire jusqu'à la fin, qui arrivera plus vite comme ça, je suppose. C'est bien ce qu'il doit penser aussi, avec raison. Mais quoi? C'est mon frère, mon sang, malgré tout. On est nés de la même terre peu fertile, où quelques graines seulement peuvent croître : l'alcoolisme, la honte, la violence, la haine, la démence.

D’automnes

Par |2016-12-21T15:11:56-05:0010 juin, 2013|Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, L'histoire commence. Atelier du roman, Roman, Textes de creation|

Tout devient tangible. Je palpe mon estomac, mon intestin glisse entre mes doigts, je serre mes viscères, ma trachée s’ouvre et laisse sortir mon cœur. Je m’invente, me réinvente et m’autosuffit. Je pourrais passer des heures comme ça, sans manger et sans boire. Juste à inventer de nouvelles couleurs à la saison triste

Feu ma mère, feu mon père

Par |2016-12-21T15:12:04-05:0013 mai, 2013|Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, L'histoire commence. Atelier du roman, Roman, Textes de creation|

— Cinquante litres en descendant. Si les chauffeurs veulent plus, tu leur vends les bidons. S’ils veulent moins, tu fais payer cash. T’acceptes pas les chèques, tu prends juste le cash. J’me suis fait arnaquer à courir après des salauds de voleurs. Tu prends le cash. Tu restes alerte, tu lis rien d’autre que le journal. Mais quand tu lis, tu regardes le poste après chaque ligne. Pas question de finir une page sans lever les yeux. Pour que l’eau coule sans rouille, tu laisses le robinet ouvert une à deux minutes chaque matin. La machine à café, c’est gratuit pour toi, mais t’abuses pas. Une tasse le matin, une le soir si tu veux. Pas plus. Si jamais t’as faim, que t’as oublié ton lunch, tu peux prendre quelque chose dans les rayons. Tu me l’écris dans le cahier noir en dessous de la caisse. Tu l’remets là après. Tu marques tes heures dedans aussi. Pour l’uniforme, je t’en prête trois. J’avais pas ta grandeur. J’aurais fait raccourcir les manches par ma femme, mais…

La mort du destin

Par |2016-12-21T15:12:13-05:001 mai, 2013|Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, L'histoire commence. Atelier du roman, Roman, Textes de creation|

Je me nomme Hugo-Guy Godbout, j’ai vingt-sept ans et je suis maintenant sans emploi. Je sais, mon nom est affreux. J’ai d’ailleurs l’intention de le changer très bientôt. Mon histoire était tout ce qu’il y a de plus ordinaire avant que je me fasse renvoyer des archives de la bibliothèque municipale. Mais ce matin-là, j’avais certainement vécu l’un des pires réveils de ma vie. Il est vrai que j’avais passé la nuit sans me faire réveiller, mais en ouvrant les yeux, je n’avais qu’une idée en tête : balancer mon radio-réveil au bout de la pièce. Il faut dire qu’il m’avait tiré du sommeil en faussant une chanson de Céline sur la chaîne Rouge-wannabe-radio-branchée. Depuis deux jours, tout semblait m’empêcher d’arriver à l’heure au boulot, mais je n’avais jamais eu autant de retard que ce matin-là. En m’assoyant sur le bord de mon lit, j’ai senti une légère humidité à mes pieds. En fait, j’avais les deux pieds dans l’eau; le réservoir à eau chaude s’était vidé durant la nuit. Il va de soi que j’ai tenté d’appeler au travail pour avertir la secrétaire de mon retard, mais comme les deux derniers jours, les boutons du téléphone ne fonctionnaient pas...

L’Arbre, ou comment ils apprirent à se faire confiance

Par |2016-12-21T15:12:22-05:0029 avril, 2013|Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, L'histoire commence. Atelier du roman, Roman, Textes de creation|

Le peintre l’aperçoit finalement lorsqu’elle est à quelques centimètres du tableau. Seulement, il ne réagit pas. Sur la toile, un arbre au milieu d’un ciel bleu, sans nuage. Les yeux de la vieille dame s’élevèrent tranquillement, comme hypnotisés par la peinture, pour allez se poser sur l’Arbre. Il bouge. Pas un mouvement créé par le vent. Le mouvement d’un animal pris au piège, qui tente de s’en sortir. L’Arbre tente de quitter sa cage de terre. Il veut partir. Sans même retourner payer son café, elle se hâte vers le manoir. Le garçon, avec la tasse dans ses mains, reste là, perplexe. Il a tout vu.

Et toc!

Par |2016-12-21T15:12:32-05:0024 avril, 2013|Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, L'histoire commence. Atelier du roman, Roman, Textes de creation|

Déposer la serviette de lin tissé devant le micro-ondes, toujours la même serviette de lin, toujours au même endroit, toujours. On ne se fait prendre qu’une seule fois à mettre sa main sous un plat de plastique brûlant. Faire pression sur le bouton-poussoir du micro-ondes, contrôler cette pression; il ne faut rien brusquer. L’important restera ma main gauche : à l’affût à chaque instant de la manœuvre. Prête, elle attrape la porte du micro-ondes, l’empêchant du même coup d’aller se heurter contre le mur. J’ai en horreur le toc qui se produit lorsqu’elle le frappe : la plainte sourde du gypse défraîchi m’horripile – personne ne vient ici, pourquoi aurais-je repeint? Ce bruit signifierait l’échec de mon entreprise, la perte de contrôle : il ne faut jamais perdre le contrôle. Immobile, elle se doit de rester immobile.

La résilience des corps

Par |2016-12-21T15:12:40-05:0015 avril, 2013|Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, L'histoire commence. Atelier du roman, Roman, Textes de creation|

— On était dans Charlevoix, dans un chalet qu’elle avait loué pour une semaine, aux Éboulements. Elle aime assez ça, aller là! Ça allait super bien, je veux dire, depuis trois mois, même un peu plus, attends, j’ai écrit dans mon agenda, ok, donc depuis le 15 octobre, elle allait bien. Pas d’absences, pas de confusion ni de crise. Elle avait une job depuis six mois, pas un gros truc, commis dans un magasin de produits naturels, mais ça lui plaisait et elle était bien contente d’avoir d’autres sous que ceux du gouvernement. En tout cas, on était au chalet qu’elle avait réservé elle-même pis qu’elle avait payé toute seule. Après trois jours, elle a commencé à moins bien feeler. Je sais pas trop comment te le décrire. Un matin, je me suis levé, elle était pas dans le lit, elle regardait dehors, en robe de chambre. Quand je l’ai embrassée, elle a sursauté et c’est comme si elle ne me reconnaissait pas.

Écrire, lire, réfléchir: dans l’ordre ou le désordre.

Par |2016-12-21T15:12:51-05:0010 avril, 2013|Cours de création littéraire, Création littéraire, Dossiers thématiques, L'histoire commence. Atelier du roman, Textes de reflexion|

Si tu veux écrire, retourne à l’école, me suis-je dit. J’avais pris conscience du fait qu’être rédactrice n’est pas être écrivaine. Est-ce que je le deviendrai un jour? Qui sait? Une chose est certaine : une fois passée l’épreuve des premiers textes soumis au regard de l’autre, l’expérience est devenue en soi une source de plaisir et d’évolution. Apprendre à lire et à écrire autrement, à montrer plutôt qu’à dire, à faire vivre les personnages plutôt qu’à les interpréter, à sortir de ma zone de confort, m’a donné le goût du roman.

Mouton et mystère

Par |2016-12-21T15:13:01-05:002 avril, 2013|Cours de création littéraire, Dossiers thématiques, L'histoire commence. Atelier du roman, Roman, Textes de creation|

La classe attendait en silence la réponse. Le professeur prenait plutôt mal les remarques de son auditoire, et les élèves le savaient. Lord Dubuc lissa ses sourcils avec ses index, inspira longuement et se leva d'un bond. Il parcourut la classe de ses yeux, puis accrocha son regard sévère dans le fond de l'âme de la jeune fille qui avait osé: «Non, Ludmilla, je ne connais pas tout, mais j'ai tout fait. Je ne dis pas ça par prétention, mais bien parce que j'ai exercé mille métiers. Et vous saurez, mademoiselle, que celui de professeur d'histoire est bien le pire puisqu'il faut endurer tous vos commentaires impertinents.» Il prit un air froissé. Ludmilla croisa les bras et fit de même. Lord Dubuc sonda la classe pour voir si quelqu'un voulait en rajouter et se retourna vers le tableau.

Le roman en mouvement: essai réflexif sur l’art romanesque

Par |2016-12-21T15:13:09-05:0027 mars, 2013|Cours de création littéraire, Création littéraire, Dossiers thématiques, L'histoire commence. Atelier du roman, Textes de reflexion|

Je souhaite un roman en mouvement, un roman qui bouge et qui fait bouger. Petite précision : faire bouger quelque chose ne signifie pas nécessairement de plaire, mais aussi de choquer, de déstabiliser et de faire résonner ou vibrer quoi que ce soit chez le lecteur. L’important, selon moi, reste d’utiliser cette tribune que nous offre le roman pour dire quelque chose. Que l’histoire soit fantastique, poétique, réaliste ou quotidienne, elle doit porter une parole et un regard différents sur notre monde et sur la vie pour nous éclairer.