[information]Ce texte a été lu dans le cadre du Déjectoire, spectacle d’ouverture du Mois de la Poésie, le 1er mars 2014, lors du Printemps des poètes de la ville de Québec.[/information]Photo_ArnaudRuelensLepoutre

I

les mains sous l’eau du robinet cassé

l’évier goûte le sang

une autre bouchée de souvenirs

avalée

certains pleurent des veines

les doigts perlés de pardons

certains se confondent dans le lavabo

et disparaissent avec les secondes

dans le noir où coule le sang

 

cigare en tête

l’accordéon s’essouffle à petits pas

suce mon tison de tabac

la cendre passe et trépasse dans l’encrier

qui flotte au fond de poumons

grattés à la pointe de plumes de pigeon

l’accordéon se racle les flancs

le tabac se fane

la tête ivre de vers blancs

écoute, ton murmure jaune émane

écoute ton rire gras

qui clôt le bouquet

écoute

chienne sale

t’as tordu le silence jeté sur moi

perché sur les branches de ma mémoire laiteuse

ne voyant qu’un fond de joie qui s’écoule

goutte à goutte par mes trous mes orbites gonflées d’orgueil

je te vois

suintante de maladresse

ta peau se détache de tous sens tous nerfs

elle décolle se pose à mes pieds

chair vive!

courant de souffle souffrance

tes muscles chantent sensations

courant de souffle atroce fraîcheur

tes muscles tiraillent

braillent

braient

s’arrachent les uns des autres

tombent

dans la poussière

où ils se vautrent sur eux-mêmes

étrange couleur

contraste chaud

ne te reste que les os

qui grincent frottent hurlent cassent

je te les retire aussi

m’empressant de les jeter au bout de mes bras

et les chiens qui accourent gueule ouverte

 

II

Hello. Oh, Hello…

bon, quessé tu veux je te raconte, toi? hein?

quessé qui te ferait plaisir à toi ?

des cochonneries? des conneries? du bon chic ou du bon genre?

de l’a-mour, du sexe, ou du porno?

gris noir une fesse? des jarrets ou des joues?

moi, c’est ton papa noël 18 ans et plus section hardcore wannabe

tout ce qui faut c’est me le baver à l’oreille

ce qui te ferait mouiller, vomir, te ferait bander dur ou semi-croquant

tout ce que tu veux pour que tu lèves un peu ton gros cul laiteux

tu le sais que t’as un gros cul

tout pour un p’tit « wow », un p’tit « honn », un long « haaaa »
un « oui, oui, oui » qui veut dire que je peux continuer à barbouiller ta face béate d’immondices à l’eau de rose… de french-kisses au menthol.

envoye! viens-t’en icitte ma chanceuse!

viens! que je te sus-tente

viens! que je te lèche-frite

viens! que je t’avalise

viens! que je te fourre-tout

que je nous ablutionne

que je m’onnisse

que je nous Asperger

que je t’escroque, m’extorque, me fraudule, te prohibe, nous putré-fide-lichet-tyrannise

pour que je puisse encore, une fois encore, sacrer mon camp dans les antillanités de mes entraves subjectives

jusqu’à m’avaler

m’avaler

m’avaler

m’avaler