Un matin, j’émerge d’un cauchemar symétrique. Deux couleurs se cherchent, filet de sang dans mon lait, grumeaux de bile dans mon quik. La cuisine se matérialise derrière le voile de ma nausée, entre l’organe et le piège.

C’est une excellente journée pour faire comme si le monde n’existait pas.

J’ai déjà tout prévu: quand on sait comment chercher (et qu’on a les bons contacts), on peut disposer d’une quantité impressionnante de films fucked up sur le net. Assez pour regretter chacun de ses choix de vie. Assez pour se découvrir soi-même le temps d’un angle tordu, se révulser un peu.

popcorn
son
lumière

un couple pimente son quotidien en intégrant un cadavre à ses ébats sexuels un chien possédé par le diable moleste un enfant une femme pourrit vivante dans son appartement un objet tombe une femme marche dans les feuilles mortes un rideau se déchire l’écran est envahi par les yeux écarquillés d’une victime sans nom ni chanson pour dater son histoire et le soleil reste indifférent à la dégradation du clair-obscur, grand bien lui en fasse

popcorn
son
lumière

l’impossible se dénude et s’exhibe devant mon regard consentant
il s’agit d’assassiner l’innocence à même la matrice pour empêcher le mal de m’atteindre vraiment
d’imposer un contrepoids à ma naïveté infantile

J’en paye chaque jour le prix. Est-ce que ça en vaut la peine?

S’agit-il d’un défi, d’un exorcisme, d’une forme particulièrement inventive d’automutilation mentale? Lucifer Valentine est-il un creep? Suis-je une bonne personne, suis-je vraiment seul dans ma grande maison, ai-je bien caché le portrait de ma mère derrière le divan du salon?

je reste flou pour que personne ne sache

un jour, j’écrirai quelque chose de vraiment terrible

***

Mon ex belle-mère m’a dit un jour: « tu salis ton âme, Sebas ». À l’époque, je n’ai pas su quoi lui répondre. Pire encore: je l’ai crue. J’ai commencé à avoir honte. J’étais la personne qui suçait la bite de son fils et je salissais son âme à coup de films dégueulasses. J’étais non-recommandable. J’empoisonnais.

L’horreur est un mode de vie permettant de décortiquer son trauma comme la carcasse d’un homard, de se foutre la face dedans

je suis une terre de poitrines ouvertes où l’on plante des fleurs impossibles

dessèchement, maigreur, altérations subtiles – zone de confort spongieuse, je suis une fleur qui ne sert à rien

j’ai pourtant
des joues, des appendices
un seul oeil

mon visage est global
corrompu
je retiens le tabou dans mes cils
maltraite équitablement les masses cancéreuses
et ce qui me reste d’humain

j’ai des gueules secrètes
au lieu d’une forme, des couleurs
permutantes

mon corps et ses divisions narcotiques jaillissent du mensonge
je m’égoutte, pleure des soupes et des fleuves de viandes
contaminent la ville

à l’ombre des horloges je démantèle le piano matinal et sa barbarie

je m’engouffre dans le labyrinthe osseux de ma ville
et mon torse s’ouvre de lui-même

je n’ai qu’un seul fantasme
celui de raser les rayons sur la tête du soleil
pour empêcher le réel
de se refermer sur moi