La grâce de perdre
un livre couché contre ta joue une orange à moitié nue
J’aime mieux ta jupe que l’humanité (suite poétique)
je cherche des voyelles sous ta jupe un embryon de mot sur ton ventre
Broderie ratée
traces d’héroïne sur notre peinture à l’aiguille
Marcelle Ferron et toi, et nous
tes coups de pattes escaladent mes flancs / entre jazz et New York / entre filles et fontaines / nos langues défoncent l’aube
Amours forestières
te caller de la toundra aux Appalaches / gueule ouverte je te nomme entre mes crocs / ça sent le muskeg
Élévation
ne pas trouver la parole humaine/et pourtant/s’élever malgré/la gravitation innée de l’abysse
Morceaux de terre
une étoile timide regarde ces fissures formant une toile une longue étreinte inattendue
L’antre de nos Amériques
nous appartenons au monde des naissances pliées sur nos genoux et nous rêvons à des âmes trop neuves pour exister
L’acte poétique: un geste d’intellectuel
Avant toute chose, j’aimerais apporter quelques considérations générales sur la thèse en recherche-création, celle-ci s’imbriquant naturellement au thème du colloque. Au fil des ans, cette thèse a pris sa place grâce à la ténacité de ceux qui ont cru à la valeur scientifique d’une pratique dont les multiples avenues révèlent un caractère bien singulier. Les professeurs-chercheurs impliqués dans ce programme universitaire relativement jeune ont balisé un terrain à l’intérieur duquel une question parvient tout de même à resurgir maintes fois : de quelles natures doivent être les liens entre la création et l’essai? Langages conceptuels et langages métaphoriques s’entrecroisent mais encore faut-il que cette cohabitation devienne opérationnelle. Voilà un enjeu fondamental. Et, dans l’essai, comment intellectualiser le travail de création qui est, en soi, un ouvrage intellectuel? Il n’y a pas de réponse simple et unique.