S’ils te disent de te noyer dans l’eau qu’ils ont eux-mêmes bénie

de mastiquer la bouche fermée

de ne plus jamais cligner des yeux

devant le chatoiement des couteaux

 

c’est toujours mieux

que de consentir

à te laquer les ongles

pour une poignée d’impies

échoués sur la banquette

d’un drive-in

 

 ***

 

Tous les soirs

ils déposent leur perruque

sur la table de chevet où s’amoncellent

billets de loto et chapelets de plastique

 

à la lueur d’une chandelle

tu arroses leurs poils d’alcool

en flairant l’animal

mort-né dans leur bave

 

tes petites mutineries

peuvent bien attendre

 

***

 

Dans la piscine hors terre

tu t’élances du haut de ta puberté

en nourrissant l’espoir

d’une nuque brisée ensevelie

sous les records de chaleur

de cet été 98

 

tu ne sais pas encore

que l’hiver suivant

n’aura rien apaisé

que la beauté captive du froid

ne suffira plus

à engourdir l’orage

sous ta jupe grise

 

tu es un paysage assoiffé

qu’aucune tempête ne viendra exaucer