Comptes rendus

Les aveux d’un jeune écrivain ou La leçon d’un vieux professeur

Par |2014-04-30T10:31:36-05:005 mai, 2014|Comptes rendus|

L’écrivain aborde ensuite la genèse de ses romans, insistant sur le travail de construction inhérent à chaque œuvre de fiction tout en rejetant l’idée d’inspiration. C’est à ce travail que renvoie d’ailleurs le titre de cette section, « De gauche à droite », réplique pragmatique qu’il sert lorsqu’on cherche à en savoir davantage sur sa façon d’écrire : « [J]’ai l’habitude de couper court à ce genre de questions en répondant : “De gauche à droite.” » (CJR : 15)

Écrire la maison de l’esprit

Par |2014-04-27T15:05:08-05:0028 avril, 2014|Comptes rendus|

Si, dans l'avant-propos, l'écrivaine affirme qu'elle « tourne autour de ce monde en décrivant des spirales » (AE : 15), on peut reprendre la même figure en ce qui concerne cet ouvrage qui encercle l'acte créatif pour tenter de le saisir sous des angles inédits et des lumières rares. Le portrait qui en émane est un peu baroque, un « territoire halluciné » (AE : 64). Elle y revendique le pari « non-narratif » (AE : 58). J’ai pensé à Roland Barthes qui, à la sortie du Mobile de Michel Butor, écrivait : «… toute Littérature, même si elle est impressive ou intellectuelle (il faut bien tolérer quelques parents pauvres au roman), doit être un récit, une fluence de paroles au service d'un événement ou d'une idée qui “va son chemin” vers son dénouement ou sa conclusion: ne pas “réciter” son objet, c'est pour le Livre, se suicider. » (1964 [1962] : 183)

Ouvrir la route

Par |2014-06-14T16:48:50-05:0022 avril, 2014|Comptes rendus|

L’idée fondatrice de Suzanne Jacob est celle-ci : avant d’écrire, l’auteur est. Son élan d’écrire « s'élabore en tout premier lieu à l'intérieur même du travail de lecture et de synthèse que chacun effectue dès sa naissance pour survivre » (BE : 31). Le discernement fait partie de son quotidien. Il lit le monde, le perçoit, l’analyse, l’interprète, le découpe en morceaux de sens, biffe, recommence, reconstruit et réaménage le monde.

Un lecteur parmi tant d’autres

Par |2013-11-25T13:18:43-05:0025 novembre, 2013|Comptes rendus|

Avec Le romancier portatif, recueil de chroniques publiées dans l’hebdo culturel Voir de 2006 à 2011, Nicolas Dickner propose une déconstruction aussi systématique que pertinente de cette vision romantique (et romancée) de l’écrivain, lui redonnant ainsi une salutaire dose d’humilité. L’avant-propos de l’auteur insiste sur la nature sociale de la littérature, où l’écrivain ne constitue qu’un des maillons de ce phénomène qui réunit une institution, une industrie et, bien sûr, des lecteurs. À partir du récit d’anecdotes sur ses activités professionnelles ou sur ses loisirs, Dickner parvient admirablement à se projeter dans les multiples rôles de l’écrivain. Le romancier portatif se lit alors comme une réflexion nuancée et enrichissante non seulement sur la création littéraire, mais aussi – et surtout – sur la lecture en tant que phénomène individuel et social.

Les conseils du Grandécrivain

Par |2013-11-11T15:41:00-05:0018 novembre, 2013|Comptes rendus|

Pour Laferrière, la littérature est une promenade dans les champs qui demande de s’adapter aux vieillards cardiaques comme aux marathoniens aguerris. Or ces promenades-là amusent davantage les vieillards cardiaques que les marathoniens, d’habitude, mais ce n’est pas plus mal puisque les premiers, force est de l’avouer, sont plus nombreux que les seconds. Ses réflexions les plus enrichissantes, il les sert au sujet de la lecture. On sent que dort là quelque polémique – ils sont nombreux ces écrivains qui se drapent dans une sorte de virginité, promettant à demi-mot qu’ils ne lisent rien lorsqu’ils écrivent, comme si dans le lit de la littérature, on était condamné à une seule position à la fois.

Entre réflexion et prise de position

Par |2013-11-03T23:12:44-05:002 novembre, 2013|Comptes rendus|

Ainsi, contrairement aux romanciers qui réfléchissent au roman selon ses finalités ou selon sa position dans l’histoire littéraire, Kundera aborde de front les devoirs du romancier, réfléchissant non seulement à ses propres romans, devenant ainsi une glose, mais aussi à la création littéraire elle-même. En ces circonstances, la réflexion sur la création appartient elle aussi à l’œuvre, elle n’en constitue plus un satellite ou une nébuleuse qu’on reconstitue à partir de l’épitexte. C’est pourquoi l’œuvre de Kundera, telle que la présente Ricard, m’apparaît aussi intéressante : elle constitue ce qui se rapproche le plus, selon moi, d’un processus de recherche-création de longue haleine où œuvre de fiction et de réflexion convergent.

D’une communauté métissée

Par |2013-11-03T23:14:34-05:002 novembre, 2013|Comptes rendus|

Né en 1946 à Saint-Boniface et résident de Toronto, Paul Savoie fait figure de pionnier au sein des institutions littéraires canadiennes-françaises qui se sont développées à partir des années 1970. Son recueil Acte de création propose vingt entretiens avec des écrivains canadiens francophones à propos de leur processus créatif. Plutôt qu’une entrevue face à face traditionnelle, Savoie choisit d’envoyer des courriels à ses confrères écrivains, leur laissant ainsi le soin de développer leurs réponses à leur rythme. Le choix de Savoie de solliciter des amis confère au recueil un ton intime qui s’avère selon moi une lame à double tranchant : si elle permet aux écrivains de se confier plus facilement, la proximité donne toutefois l’impression au lecteur à certains moments d’interrompre une conversation en cours depuis vingt ans. Néanmoins, la relation de compagnonnage qui rend possible ces entretiens traduit admirablement la situation particulière des écrivains canadiens-français.

La « machine à écrire de la littérature »

Par |2013-11-03T23:15:32-05:002 novembre, 2013|Comptes rendus|

Il faut savoir d’emblée que La machine littérature présente Calvino en tant que lecteur plutôt qu’en tant qu’écrivain. Les rares commentaires sur ses créations prennent généralement la forme de réponses à divers enjeux que la critique savante a mis de l’avant chez lui, comme l’usage de l’anthropomorphisme. Calvino n’interroge pas directement sa pratique, mais plutôt la littérature : sa constitution, ses visées; sa valeur symbolique comme fait social et comme œuvre d’art. Une telle posture, paradoxalement, ne peut que nous renseigner sur sa conception de la création littéraire; l’écrivain ne peut jamais faire abstraction de ses propres lectures et de sa position au sein du champ littéraire lorsqu’il choisit non seulement de créer, mais de réfléchir à son acte créateur.

Une littérature d’enquête

Par |2013-11-10T23:07:16-05:002 novembre, 2013|Comptes rendus|

La lecture, pour Yergeau, se rapproche du jeu, mais d’un jeu fondamental où l’individu développe ses facultés de compréhension et d’appréhension du réel afin d’échapper aux « méta-récits » qui cherchent à l’avaler. C’est pourquoi il faut lire les fictions de Yergeau comme des essais elles aussi, des créations réfléchissant en elles-mêmes sur leur processus de construction.