12.
J’ai pris la pilule du lendemain, j’ai bu du vin, fumé, mais il est resté là. Je sens sa force, sa chaleur dans mon ventre. Je l’aime sans réserve, mais ça ne m’empêche pas de renoncer à lui.
J’ai pris la pilule du lendemain, j’ai bu du vin, fumé, mais il est resté là. Je sens sa force, sa chaleur dans mon ventre. Je l’aime sans réserve, mais ça ne m’empêche pas de renoncer à lui.
J’ai eu envie de vomir. De refuser mes brochettes de tofu . De retourner chez nous jeûner jusqu’au lendemain pour effacer les chairs dont elle venait de souligner le rebondi.
Dans les allées du Jean Coutu de la rue Saint-Vallier, l’éclairage des néons me crachait au visage sa lumière violente. J’avançais, chambranlante et jetais pour la première fois les yeux sur ce rayon ignoré mille fois auparavant.
En sortant, je force un sourire en remerciant ma psy. Je ne suis pas prête à affronter le reste, mais il le faudra.
J’ai un pied dans la vie, l’autre dans ma tête. Si j’avais plus que deux pieds, j’en aurais un sur papier, un dans une autre vie imaginaire, un sur un autre continent.
Quand je pense à une descendance nombreuse, j’ai l’affiche de chez le vétérinaire en tête, celle en forme de pyramide, qui nous informe qu’il est important de faire stériliser nos chats. On y voit une chatte tout en haut, puis deux trois chats en dessous, puis dix, puis vingt.
Sa silhouette est pleine et ferme, la mienne immature et flasque. Malgré ses livres de plus, elle paraît svelte, dessinée. Je suis une fausse-mince-molle, une silhouette incertaine difficile à habiller, impossible à habiter.
Égoïste, lâche ou courageuse ? La seule certitude que j’ai, fin août, début septembre 2011, c’est que je ne veux pas mettre le pied dans l’univers des mamans. M’en tenir à l’écart est peut-être le seul pouvoir que j’ai d’être la femme que je veux et non celle que mon sexe ou mon époque me dictent.
On parle de Nelly, seulement d’elle et de sa disparition, dans cette fin d’après-midi où nos voix s’enveloppent d’un étrange écho. Nous ne sommes pas seules. Un spectre, assis avec nous dans la chaleur du cabinet, se demande qui l’interpelle ainsi.
Me ramancher sans l’aide de personne. Tentative de me fabriquer moi-même.