Ce texte a été écrit dans le cadre du colloque « Forum interuniversitaire des étudiants en création littéraire », qui a eu lieu les 6 et 7 octobre 2016 à l’Université Laval.

Dans le cadre du premier séminaire de méthodologie au doctorat en études et pratiques des arts, nous devions porter un regard rétrospectif sur notre pratique artistique en reculant au plus loin de notre souvenir afin d’identifier les premières traces de ce que nous arrivons aujourd’hui à conceptualiser et à placer en tant que figures, thèmes et formes privilégiés de notre démarche. Il s’agissait de constituer un « récit de pratique », donc de dresser un chemin relativement droit afin d’offrir une logique claire de notre rétrospection. Inutile de dire que j’étais d’emblée mal à l’aise, moi qui, depuis plusieurs années maintenant, célèbre l’éparpillement en tant que « démarche », mot à prendre dans tous ses sens : moyens utilisés pour arriver à mes fins, façons de faire progresser un raisonnement, manières de marcher. Ma démarche n’est pas droite : elle est déviée par des vides, des absences, des exils, des ruptures, des dualités, des errances, bref toute sorte d’éparpillements donnant à ma pratique une forme qui n’est peut-être pas droite mais qui répond quand même à une logique certaine, une logique du mouvement.

Pour le bien de l’exercice, j’ai donc consulté mes premiers carnets de l’adolescence, ceux dans lesquels la recherche de style et de personnalité s’exprime sans inhibition, sans autre rigueur que celle de l’honnêteté : dessins, poèmes, courts essais, notes éparses et gribouillages cohabitent dans un désordre assumé, tous pourtant désireux de poser les questions de l’identité et de laisser les traces chaotiques des chocs auxquels le soi se confronte à cet âge où tout est encore possible. La période des carnets s’étend de l’adolescence au moment où, jeune adulte, j’ai visité avec mon père le Chili, pays où je suis né et que j’ai quitté avec ma famille à l’âge de quatre ans. Ce retour au pays natal a ajouté de nouveaux chocs, les premiers chocs, dont on ne trouve que de subtils indices dans les carnets et qui, au retour, ont donné lieu à ce que je considère aujourd’hui comme la base (à prendre comme le lieu de référence autant que celui de départs et de retours) de ma démarche en recherche-création.

Cette communication vise à ajouter quelques pistes à la recherche-création en embrassant les libertés créatives propres à cette discipline qui, faut-il le rappeler, ne sont pas considérées comme un manque de rigueur, mais au contraire comme un « nœud de questions [qui assument] la part subjective de ma démarche » (Lemmens, 2013). Je tenterai dans cette communication de dénouer les questions qui sont apparues à partir de mon retour de ce voyage au Chili, à partir des premiers chocs. Depuis la rédaction de mon mémoire de maîtrise et jusqu’à ce début d’études doctorales, je perçois ces chocs comme des mouvements répétés, des mouvements spiralés dont le point de départ est l’exil et qui donnent lieu à la déambulation, au voyage, à l’investissement des frontières et à l’intermédialité. Il s’agit là de nœuds que je fais et défais tous les jours pour me déplacer, pour sortir dehors, pour me confronter aux autres déplacements me rappelant la sortie première et pour, éventuellement, revenir à la maison toujours le même, mais toujours un peu autre.

Premiers chocs, premiers mouvements : exil territorial, linguistique, identitaire

Je parle une langue qui ne coule pas dans mes veines. J’ai appris le français à l’extérieur du foyer et rapidement je l’ai maîtrisé. C’est en français que je suis devenu écrivain, que je suis devenu enseignant… de français! C’est en français que j’ai dit aux autres qui j’étais, que j’ai exprimé ma différence, que je me suis engagé, que je me suis révolté, que j’ai récité et écrit des poèmes sans jamais arriver à combler les trous de ma mémoire : malgré ma maîtrise du français, cette langue demeure celle de l’autre et me transporte ailleurs « comme si la langue étrangère, même si elle est acquise correctement à un niveau syntaxique, ne plongeait pas ses racines jusqu’à la mémoire infantile » (Kristeva, 1992 : 30), et ce, quels que soient les stratagèmes, les détours et les jeux de langage pour faire de cette langue ma langue. En contrepartie, ma langue maternelle est celle que je maîtrise le moins, celle qui pourtant me fait pleurer. Langue émotive, langue d’affect, langue de punition et de consolation, l’espagnol est la langue de la famille dans tout ce qu’elle a de plus intime et de plus indiscret. Ce bref retour au Chili accompagné de mon père a donc modifié ma relation aux langues; on pourrait dire rapidement que les langues n’allaient plus de soi. Là-bas, je remarquais mes lacunes, mes o trop ronds, mes r trop gutturaux. Là-bas, on s’étonnait de mon accent, de ma lenteur à trouver les mots; on me demandait d’où je venais, si j’étais Brésilien. Ici, au Québec, je suis devenu très sensible à tout ce qui soulignait cette différence, aux nombreuses questions et remarques qui viennent de mon nom de famille pas très latino, de mon teint de peau pas très caucasien, de mon accent pourtant québécois. Le multilinguisme doit être mis à distance et sorti de sa fixité pour qu’il devienne cette « richesse » qu’on a tendance à comparer à un bagage plus diversifié, bagage bien rempli qui, finalement, ne peut devenir que plus lourd…

Au sujet des premiers chocs, dans mon mémoire de maîtrise, j’écrivais ceci :

devant ce genre de fascination ou de catégorisation de ma différence, il est difficile de ne pas tout rejeter. Je risque toujours le néant : être ni ceci ni cela, ne venir ni d’ici ni de là. Comment faire part des chemins que je dois parcourir sans cesse afin de fuir les catégories tout en évitant la simple hybridité? La question que l’on me pose n’est peut-être pas la bonne. D’où es-tu relève la différence et tente de l’abolir, de boucher la faille et de rassurer. D’où devrait se remplacer par comment, par avec quelle démarche. Ainsi la question de l’origine ne se poserait plus en vertu d’un lieu d’appartenance et d’un enracinement. Elle rendrait justice aux mouvements qui me déplacent d’une langue à l’autre, d’un pays à l’autre. (Dawson, 2009 : 104)

J’en suis alors venu à m’identifier plutôt à un entre-deux dont « l’absolue liberté s’appelle solitude » (Kristeva, 1988 : 20), un entre-deux qui pousse parfois vers l’éparpillement, vers une errance aussi écrasante (puisque le bagage est lourd) qu’extrêmement inspirante pour la création. Dans cet entre-deux, je me suis mis à rêver, à créer, à errer; de cette errance linguistique, territoriale et identitaire est née ma passion pour la déambulation.

Second mouvement : déambulations

Ma maîtrise en création littéraire m’a permis d’affronter ces premiers mouvements, ceux liés à la langue et à l’exil, mais je devais également faire l’expérience de l’errance physiquement, dans le réel, à même le corps. Parallèlement au travail académique, je me suis mis en mouvement en créant un blogue photographique et littéraire sur la déambulation, L’écran fenêtre, qui me forçait à marcher, à suivre des chemins hasardeux, avec cette même attention particulière du nomade qui transforme les promenades en de réelles expériences « dans l’action, dans l’événement même, dans le mouvement essentiel du corps dans l’espace » (L’Allier, 2004 : 13). Plus qu’une figure ou qu’une simple activité, la déambulation est une manière d’être qui permet de s’arrimer à la trajectoire infinie du monde dont le seul objectif est sa rotation. À ce propos, Ying Chen, dans son recueil Quatre mille marches, dit ceci : « Ceux qui veulent arriver quelque part aspirent à une terre particulière. Or toutes les terres ont tendance à nous repousser ou à nous enfermer » (2004 : 36). La déambulation me libère à chaque pas du choix d’un pays auquel m’identifier – autant dire dans lequel m’emprisonner – et d’un autre pays duquel m’arracher à nouveau comme un calque perpétuel et cauchemardesque de l’exil.

La poésie sied bien aux mouvements de la déambulation : elle en porte les sons, les rythmes et les images. C’est en poésie qu’on peut dépeindre le déambulateur en tant que nomade qui avance « un œil droit devant et l’autre vers la lumière » (Dawson, 2010 : 47), celui qui « se promène non seulement dans sa propre mémoire, en méditant sur ses souvenirs, mais au cœur de la mémoire collective, [parmi] les signes de l’espace [qui lui] rappellent qu’il existe parmi tant d’autres[,] que les traces des hommes se chevauchent pour aviver sa perception » (L’Allier, 2004 : 21). À cela, j’ajouterais que ces mêmes traces des autres qui sont passés par là se superposent et créent une sorte d’archive des souvenirs errants uniquement visible par l’éparpillement qu’imposent ces promenades ne se terminant que pour mieux recommencer le lendemain. Ces recommencements perpétuels de la déambulation me font retourner sur les pas des autres de manière à m’installer dans une lignée mémorielle, ou plutôt une courbe, un cercle, sans tout à fait m’affranchir des frontières, mais en me donnant le pouvoir de jouer à saute-moutons par-dessus ce qui sépare et exclut. Ce sont ces retours qui m’octroient un tel pouvoir, ces retours qui ne sont pas de simples redites ou des tautologies, mais plutôt des performances renouvelées de l’exil, c’est-à-dire une manière pour mon corps, puis ma pensée et mon écriture, de répondre par le mouvement aux mouvements auquel l’exil m’a destiné.

Troisième mouvement : voyages

Ces déplacements auraient la forme d’une spirale : les détours qu’ils me forcent à prendre donnent lieu à des réflexions qui donnent lieu à des écrits – essais, poèmes, proses – qui procurent à leur tour le besoin de reprendre la marche, et ainsi de suite. Bref, plus on marche, plus on marche : plus les lieux, les quartiers, les villes s’agrandissent et découvrent de nouvelles voies/voix à suivre pour de nouveaux lieux, de nouveaux quartiers, de nouvelles villes. Puis on se trouve, soudain, dans un autre pays à marcher comme un équilibriste heureux de se confronter aux autres et, par le fait même, à la précarité de son identité. L’écran fenêtre, depuis quelques années, s’est transformé en blogue exclusivement de voyage dans lequel mes photographies et mes essais déambulatoires abordent désormais des notions liées à l’ailleurs : à mesure de mes déplacements en Europe et en Amérique latine, ma photographie est tranquillement devenue plus lumineuse et plus vaste, tandis que mon écriture, plus analytique et plus expérimentale, a progressivement fait de moi cet écrivain qui écrit avec ce que Jean-Yves Pouilloux appelle un « double régime de la parole », c’est-à-dire cet écrivain qui dit « presque toujours deux choses à la fois, un versant où il note ce qu’il se passe et un autre où il le met à une certaine distance » (2002 : 105). Bien qu’ils décrivent l’écrivain-voyageur, aussi adhéré à son expérience de voyage et d’écriture qu’il en est critique, ces mots de Jean-Yves Pouilloux (en réalité servant à commenter les écrits de Nicolas Bouvier) peuvent aisément servir à définir le travail du chercheur-créateur qui, pour reprendre l’image utilisée tout à l’heure pour illustrer la démarche du déambulateur, regarde d’un œil la route qu’il a dessinée devant lui à force de lectures, de plans et d’une méthodologie de recherche, tandis que, de l’autre, il demeure attentif aux parcours flottants qui se tracent dans le ciel comme une peinture à mesure qu’il avance. À cet égard, je reviens à Kateri Lemmens : « [le chercheur-créateur] reconduit la pensée vers la beauté et la beauté vers la pensée, tout à la fois [; son travail se lit] comme une seule pièce à deux côtés […] qu’on fait tournoyer » (2013). Retours, spirales, voyages et tournoiements… tous des mouvements qui font osciller entre proximité et distance, entre ici et ailleurs, entre théorie et création; tous des mouvements me dotant d’une voix multiple, polysémique, polyglotte et polymorphe, une voix qui trouve ses échos dans l’entre-deux auquel je me suis identifié, là même où j’arrive à affronter (non sans crainte, mais avec un réel sentiment d’émancipation) les enjeux difficiles de ma pratique artistique et de mon rapport à la pensée depuis ce que j’ai appelé, dans cette présente communication, les premiers chocs, les premiers mouvements.

Quatrième mouvement : frontières

Je reviens donc à cet exil dont je n’ai que peu de souvenirs : ceux qui se sont formés en moi depuis toutes ces années, je les ai tous retrouvés dans les récits des autres et sur des photographies, à l’instar de la postmémoire qui désigne « la relation que la “génération d’après” entretient avec le traumatisme personnel, collectif et culturel ((En ce qui me concerne, il s’agit non seulement du traumatisme de la dictature chilienne, mais aussi celui de l’exil en tant qu’expérience familiale, en tant que fait chilien et en tant que phénomène culturel mondial.)) subi par ceux qui l’ont précédée, avec des expériences dont elle ne “se souvient” que par le biais d’histoires, d’images et de comportements au milieu desquels elle a grandi » (Hirsch, 2013 : 6). J’observe alors mes souvenirs de biais et avec méfiance, car c’est par procuration qu’ils me font pleurer et qu’ils me font rêver. Je suis un exilé de deuxième génération; pas moins exilé que mes parents, mais dont l’exil est propulsé par la médiation. Mes souvenirs me procurent une nostalgie similaire, aussi stérile que la leur, mais les miens sont médiatisés, témoignés; ils s’opèrent « d’un investissement imaginaire, d’une projection » (Hirsch, 2016 : 6), mot à prendre dans son sens mouvant, dans son sens lyrique : se projeter au-delà de soi en toute écoute et en tout respect des autres (de leurs histoires, de leurs récits, de leur nostalgie) pour qu’au retour le soi se modifie, se façonne sans appropriation avec ce qu’il a glané chemin faisant. Ma mémoire ne fait plus référence directement au pays comme une simple remémoration mystique (malgré les parfums de la mer et du pain chiliens qui m’émeuvent encore); ma mémoire réfère plutôt à la trajectoire que poursuivent ces odeurs, aux frontières que ces images du Chili, ces récits chiliens, ces archives, artéfacts et autres témoignages traversent en se modifiant pour me revenir sous des formes voyageuses ayant le pouvoir de changer mon récit d’exil. L’établissement d’un tel récit (toujours à recommencer parce que l’écoute est éternelle et l’identité est changeante) ne se fait pas en s’appropriant celui des autres. Au contraire, il se détruit et se reconstruit, se façonne par l’intervention des autres de sorte que ma voix qui parle, ma main qui écrit et la langue que j’utilise sont multiples, deviennent des voix, des mains et des langues qui s’expriment dans une esthétique dont l’objectif est aussi de rendre évidentes les différentes médiations et les échanges à même les frontières qui sont au cœur du récit.

Ce sont ces frontières qui m’intéressent, mais des frontières plus larges qu’une ligne sur une mappemonde dont les possibilités sont plus mouvantes et émancipatrices qu’un mur. Avec ma démarche, je désire déconstruire la notion de frontière comme le fait l’auteure queer Gloria Anzaldúa avec le « borderland » (1987), notion qu’elle a imaginée comme une métaphore afin de créer un espace qui, au lieu de séparer les pays, rend possible les mouvements et interactions nécessaires à la rencontre des différences. Borderland : un terrain-frontière, un safe space pour les divers « nous », un entre-deux affranchi des lieux entre lesquels il se trouve sans que l’on puisse pourtant nier la présence des frontières qui nous clivent, un lieu où se perpétuent les exils dont les démarches sont celles-là mêmes du nomadisme, de l’errance, de ce qu’Amy Kaminsky définit comme « a process of movement and change » (1999 : xvi) dont les liens qu’on peut tisser avec la recherche-création sont multiples.

Cinquième mouvement : intermédialité

Ce processus induit par l’exil, le premier choc qui m’identifie, se répète ou plutôt s’actualise à chacun de mes pas, à chacun de mes voyages, chaque fois qu’une photographie accompagne un de mes textes : non seulement je m’oblige ainsi, dans la forme même de la création, à passer d’un médium à l’autre comme on traverse une rue, je force aussi le lecteur-spectateur à se déplacer à la fois du trottoir textuel au trottoir visuel et, dans une sorte de remémoration spiralée, du présent de son expérience de lecture à un passé aux contours flous (peut-être devrais-je dire « des passés » puisque dans l’expérience du mouvement, il s’agit bien de mon passé – celui de la création et celui de l’exil – autant que du sien). Il adopte alors cette démarche qui actualise le déplacement initial, l’exil qu’une pratique intermédiale rend plus fort, plus autoréflexif et plus mouvementé.

J’emprunte alors quelques mots de Mélanie Clouâtre qui, dans son « Étude des relations intermédiales entre la photographie et l’écriture », emprunte à son tour le vocabulaire d’Éric Méchoulan afin d’expliquer les déplacements qu’induisent les pratiques intermédiales : « l’intermédialité demeure un état de mouvance, un oscillement où les langages de différents dispositifs […] se confrontent en ce lieu mitoyen afin de faire surgir des ressemblances et des différences entre eux » (2011 : 58). Cette définition vise à rendre compte de la relation entre l’espace matériel de l’œuvre intermédiale et le temps; la création d’une œuvre intermédiale, tout comme sa lecture, découvre un espace comme « un “pli du temps” [expression empruntée à Éric Méchoulan] dans lequel s’actualise son passé » (Idem.), un lieu qui fait bouger l’œuvre, celui qui la crée et celui qui la lit dans l’espace et dans le temps, un pli, un terrain fait de rencontres, de chocs et de confrontations situé entre des lieux circonscrits et qui fait vivre à tout ce monde ce que Mélanie Clouâtre appelle « l’expérience de l’entre-deux » (Idem.).

* * *

L’intermédialité permet alors de considérer l’objet de création comme un pôle d’une démarche multiple, faite de passages entre les discours et entre les instances faisant partie de l’expérience, d’une démarche qui, de surcroît, ne se complète qu’en regard de l’autre pôle, celui de la réflexion et de la recherche : en me déplaçant de l’un à l’autre se forme une réelle pensée-création, une mise en mouvement qui donne une forme à ce qui peut, au départ, ressembler à d’éternels éparpillements. C’est ainsi que la recherche-création est un privilège pour l’exilé qui ne peut faire autrement que de multiplier ses exils lorsqu’il pense et lorsqu’il crée. À cet égard, je m’accorde avec les propos optimistes de Pierre-Luc Landry qui célèbre la multiformité de notre discipline : « l’aspect polymorphe de la recherche-création est sans conteste un avantage » (2016) pour celui dont les précaires racines ne prennent que dans un espace aussi mouvant que l’entre-deux, le borderland, cet espace aux formes spiralées où seul le mouvement est un moteur à la parole. L’aspect polymorphe de la recherche-création est exactement ce qui me permet de façonner les récits de ma pratique éparpillée, de donner une forme qui, comme celle de l’essai, rend compte des déplacements qui la constitue, une forme qui est ni une ligne droite ni une limite.

En bref, pour moi qui suis exilé de deuxième génération, qui ne suis pas blanc, qui ne suis pas né ici et qui écris dans une langue d’emprunt, la recherche-création constitue l’un des rares lieux dans lequel je deviens un véritable privilégié : soumis depuis les premiers chocs aux formes mouvementées de l’exil, je suis l’heureux accoutumé au langage même de cette discipline et de cette méthodologie diversifiées qui, dans nos différences et dans un lieu comme celui-ci qui pourrait s’apparenter à un safe space, nous rassemble.


[heading style= »subheader »]Bibliographie[/heading]

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CLOUÂTRE, Mélanie, « Saisir la réalité de sa mort par l’écriture photographique. Étude des relations intermédiales entre la photographie et l’écriture dans L’usage de la photo et Les années d’Annie Ernaux », mémoire de maîtrise, Département de langue et littérature françaises, Université McGill, 2011.

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HIRSCH, Marianne, « Postmémoire/Postmemory », dans Art Absolument, numéro spécial : « Création et postmémoire », avril-mai 2013, p. 6-11.

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KRISTEVA, Julia, « En deuil d’une langue? », dans Autrement : série Mutations, no 128, mars 1992, p. 27-36.

KRISTEVA, Julia, Étrangers à nous-mêmes, Paris, Gallimard, coll. « Essais », 1988.

L’ALLIER, Alexis, « La déambulation, entre nature et culture », dans André CARPENTIER et Alexis L’ALLIER [dir.], Les écrivains déambulateurs. Poètes et déambulateurs de l’espace urbain, Montréal, Département d’études littéraires, UQÀM, coll. « Figura », 2004, p. 13-44.

LANDRY, Pierre-Luc, « Résister. Transgresser. Créer dans les ruines de l’université. », dans Le Crachoir de Flaubert, 4 avril 2016, [en ligne]. http://www.lecrachoirdeflaubert.ulaval.ca/2016/04/resister-transgresser-creer-dans-les-ruines-de-luniversite-une-conference-de-pierre-luc-landry/ (Page consultée le 23 septembre 2016).

LEMMENS, Kateri, « Pile et face : l’essai littéraire, pensée et création », dans Le Crachoir de Flaubert, 7 janvier 2013, [en ligne]. http://www.lecrachoirdeflaubert.ulaval.ca/2013/01/pile-et-face-lessai-litteraire-pensee-et-creation/ (Page consultée le 23 septembre 2016).

POUILLOUX, Jean-Yves, « Approche de l’écriture », dans Christiane ALBERT, Nadine LAPORTE et Jean-Yves POUILLOUX [dir.], Autour de Nicolas Bouvier. Résonances, Paris, 2002, p. 99-134.